Publié le 11 mars 2024

Le prix affiché d’une voiture n’est que la pointe de l’iceberg; le coût réel de possession au Québec peut être jusqu’à 60% plus élevé une fois tous les frais inclus.

  • Les choix basés sur l’émotion, comme opter pour un VUS en ville, peuvent entraîner des surcoûts annuels de plusieurs milliers de dollars en essence, assurances et entretien.
  • Les financements à long terme (plus de 72 mois) créent un risque élevé de « capital négatif » (la « balloune »), où votre dette dépasse la valeur de votre véhicule.

Recommandation : Avant de visiter un concessionnaire, utilisez les outils de cet article pour établir votre Coût Total de Possession (CTP) et obtenez une préapprobation de prêt auprès de votre institution financière pour mieux négocier.

L’achat d’une nouvelle voiture est souvent un projet excitant, synonyme de liberté et de renouveau. On s’imagine au volant, profitant du confort et des dernières technologies. Rapidement, pourtant, l’enthousiasme laisse place à une question angoissante : combien cela va-t-il vraiment me coûter ? La plupart des ménages pensent spontanément au paiement mensuel, à l’essence et aux assurances. C’est un bon début, mais cette vision partielle est le premier pas vers des difficultés financières. Le budget automobile est un véritable iceberg : la partie visible cache une masse de dépenses immergées qui peuvent faire chavirer les finances familiales.

La discussion se concentre souvent sur les listes de dépenses à ne pas oublier : immatriculation, changement de pneus, entretiens préventifs, réparations imprévues, et la fameuse dépréciation. Ces éléments sont essentiels, mais se contenter de les additionner ne suffit pas. Et si la véritable clé pour maîtriser son budget auto n’était pas un simple exercice de mathématiques, mais plutôt une stratégie de défense ? Une approche pour déjouer les pièges psychologiques, les techniques de vente éprouvées et les coûts cachés structurels qui sont conçus pour vous faire dépenser bien plus que ce que vous aviez prévu.

Cet article adopte l’angle d’un conseiller budgétaire. Notre objectif n’est pas seulement de vous aider à lister vos dépenses, mais de vous armer pour prendre des décisions éclairées et rationnelles. Nous allons décortiquer le Coût Total de Possession, analyser les pièges du financement, évaluer l’impact de vos choix de vie sur vos assurances et vous donner des outils concrets pour ne plus jamais subir le processus d’achat. Vous apprendrez à voir au-delà du paiement mensuel et à protéger durablement votre santé financière.

Pour vous guider dans cette démarche, cet article est structuré en plusieurs étapes clés. Chaque section aborde un aspect critique du processus de décision, des illusions coûteuses aux stratégies de négociation, pour vous permettre de construire une vision complète et réaliste de votre budget automobile.

Pourquoi acheter un 4×4 pour la ville est un gaspillage d’argent pour 90% des gens ?

Le VUS (Véhicule Utilitaire Sport) est devenu l’incarnation du désir automobile au Québec. On le choisit pour un sentiment de sécurité, sa position de conduite surélevée et l’impression d’être paré pour affronter nos hivers rigoureux. Pourtant, pour un usage majoritairement urbain, ce choix relève plus du budget émotionnel que du budget rationnel. En réalité, un VUS est une machine à générer des coûts supplémentaires qui pèsent lourdement sur le portefeuille. La traction intégrale, si rassurante en apparence, n’est utilisée que dans une infime partie des situations de conduite, mais son coût, lui, est permanent.

L’écart de dépenses est colossal. On ne parle pas de quelques centaines de dollars, mais de milliers. Entre le prix d’achat supérieur, la consommation d’essence plus élevée, des assurances plus chères et des pneus plus coûteux, le fossé se creuse rapidement. Une étude de CAA-Québec met en lumière ce gouffre financier : pour un kilométrage annuel similaire, le coût en essence peut être drastiquement différent. Par exemple, un VUS peut coûter près de 9 000 $ en carburant annuellement, contre 3 300 $ pour une berline. C’est une différence qui, sur la durée de possession du véhicule, pourrait financer la totalité des études d’un enfant ou un projet de rénovation majeur.

Vue latérale comparative d'un VUS et d'une berline dans un stationnement urbain québécois

Comme cette illustration le suggère, la taille du véhicule a des implications directes en milieu urbain. Au-delà des coûts, se garer devient plus complexe, et la manœuvrabilité est réduite. Le tableau suivant, basé sur des données compilées pour le marché québécois, illustre le Coût Total de Possession (CTP) sur cinq ans et démontre l’impact financier d’un choix dicté par l’émotion plutôt que par le besoin réel.

Comparaison du coût total de possession sur 5 ans : VUS vs Berline
Critère VUS compact Berline compacte Différence
Prix d’achat moyen 35 000 $ 25 000 $ +10 000 $
Essence/an (20 000 km) 9 000 $ 3 300 $ +5 700 $
Assurance moyenne 1 200 $/an 900 $/an +300 $/an
Pneus d’hiver 1 800 $ 1 200 $ +600 $
Coût total sur 5 ans 82 500 $ 49 500 $ +33 000 $

Choisir un véhicule adapté à 95% de ses trajets annuels, et non aux 5% de situations exceptionnelles, est la première règle d’or d’un budget automobile sain. Pour la plupart des citadins, une berline ou une compacte moderne équipée de bons pneus d’hiver offre toute la sécurité et la polyvalence nécessaires, sans le fardeau financier du VUS.

Financement concessionnaire ou prêt bancaire : où trouver le taux le plus bas ?

Le financement est le nerf de la guerre. Une fois le modèle choisi, la discussion se porte sur le paiement mensuel, et c’est là que se tendent les pièges les plus courants. Les concessionnaires excellent dans l’art de présenter des offres alléchantes : des taux d’intérêt promotionnels à 0% ou 1,99% et des mensualités qui semblent très abordables. La vigilance est de mise, car ces offres masquent souvent une réalité moins reluisante : un prix de vente plus élevé et non négociable, ou une durée de prêt déraisonnablement longue.

La première étape est de ne jamais arriver chez le concessionnaire sans préparation. Avant même de commencer à magasiner, consultez votre propre institution financière pour obtenir une préapprobation de prêt. Cela vous donne un taux de référence solide et transforme la négociation. Vous n’êtes plus captif de l’offre du vendeur; vous avez une alternative concrète. En 2024, le taux d’intérêt moyen pour un prêt automobile au Canada était de 7,59 %, un chiffre qui sert de baromètre pour évaluer les propositions que l’on vous fait.

Le piège le plus dangereux aujourd’hui est l’allongement de la durée des prêts, qui s’étirent parfois jusqu’à 84 ou même 96 mois (8 ans). Si cela réduit la mensualité, cela augmente drastiquement le coût total du crédit et vous expose à un risque majeur : le capital négatif, ou la fameuse « balloune ».

Le piège du capital négatif : l’exemple d’un prêt sur 8 ans

Au Québec, la dépréciation d’un véhicule est rapide : il perd environ 50% de sa valeur après seulement 3 ans. Si vous financez votre voiture sur 8 ans, après 3 ans, vous avez remboursé moins de la moitié de votre prêt, mais votre voiture, elle, a déjà perdu la moitié de sa valeur. Vous vous retrouvez dans une situation où le solde de votre prêt est supérieur à la valeur de revente de votre véhicule. Si vous devez changer de voiture à ce moment-là (à cause d’un accident, d’un changement de situation familiale, etc.), la différence, ce « capital négatif », devra être refinancée et ajoutée au prêt de votre nouvelle voiture. C’est un engrenage de dettes duquel il est très difficile de sortir.

En tant que consommateur averti, vous devez exiger la divulgation du coût total du crédit et comparer les offres sur la base de ce chiffre, et non sur la seule mensualité. Un prêt sur 48 ou 60 mois, même avec un paiement mensuel légèrement plus élevé, est presque toujours une décision financièrement plus saine à long terme.

Louer ou acheter : quelle option choisir si vous faites 25 000 km par an ?

La question « louer ou acheter ? » est un classique. La réponse dépend presque entièrement de votre profil de conducteur, et notamment de votre kilométrage annuel. Pour un « gros rouleur », qui parcourt 25 000 km ou plus par an, le calcul doit être fait avec une attention particulière. La location, souvent perçue comme une option sans tracas avec des paiements mensuels plus bas, peut rapidement devenir un gouffre financier si vous dépassez la limite de kilométrage allouée.

Les contrats de location au Québec incluent généralement une allocation de 16 000 à 20 000 km par année. Chaque kilomètre excédentaire est facturé à un taux de pénalité variant de 0,10 $ à 0,20 $, voire plus pour les véhicules de luxe. Pour quelqu’un qui fait 25 000 km par an, un dépassement de 5 000 km peut signifier une facture surprise de 500 $ à 1 000 $ à la fin de chaque année de location. Sur un bail de 4 ans, c’est jusqu’à 4 000 $ de frais imprévus.

Gros plan sur un compteur kilométrique de voiture avec reflets lumineux

L’achat, en revanche, vous affranchit de toute contrainte de kilométrage. Bien que les paiements mensuels soient souvent plus élevés, vous construisez une équité dans un actif (qui se déprécie, certes) et vous avez la liberté totale de l’utiliser comme bon vous semble. Pour un gros rouleur, la dépréciation accélérée due au kilométrage élevé est un facteur, mais elle est souvent moins pénalisante que les frais de dépassement de la location. De plus, une voiture bien entretenue, même avec un kilométrage élevé, conserve une valeur de revente sur le marché québécois.

Un facteur récent vient toutefois nuancer ce débat : les véhicules électriques (VÉ). Grâce aux généreuses subventions gouvernementales, l’achat d’un VÉ devient de plus en plus compétitif. En effet, les subventions québécoises et fédérales peuvent atteindre jusqu’à 12 000 $, ce qui réduit considérablement le coût d’acquisition et peut rendre l’achat plus avantageux que la location, même avec des paiements mensuels initialement plus hauts. Le coût par kilomètre d’un VÉ étant drastiquement plus bas, l’argument économique penche encore plus vers l’achat pour les gros rouleurs.

En conclusion, si vous parcourez plus de 25 000 km par an, l’achat est presque toujours l’option la plus judicieuse. La liberté qu’elle offre et l’absence de pénalités compensent largement des paiements mensuels un peu plus élevés. La location ne devrait être envisagée que si vous êtes certain de rester sous la limite ou si changer de voiture tous les 3-4 ans est une priorité absolue pour vous, et que vous êtes prêt à en payer le prix.

L’erreur de signer le contrat le soir même de la première visite

Vous avez trouvé la voiture parfaite. Le vendeur est sympathique, l’essai routier était concluant, et l’offre sur la table semble raisonnable. C’est à ce moment précis que le piège de la pression décisionnelle se referme. Le concessionnaire automobile est un environnement conçu pour provoquer une décision rapide et émotionnelle. Des phrases comme « cette offre n’est valide que ce soir », « j’ai un autre client qui vient la voir demain matin » ou la fameuse technique du « four-square » (la feuille divisée en quatre cases pour vous embrouiller sur le prix, l’échange et les paiements) sont des tactiques éprouvées pour court-circuiter votre réflexion rationnelle.

Céder à cette pression et signer le soir même est l’une des erreurs les plus coûteuses. Vous êtes fatigué, excité, et moins apte à analyser les détails d’un contrat complexe. La règle d’or est simple : ne signez jamais rien lors de la première visite. Rentrez chez vous avec l’offre écrite et prenez au moins 24 heures pour l’analyser à tête reposée, loin de l’influence du vendeur. Cette pause vous permet de vérifier les calculs, de comparer avec votre préapprobation bancaire et de vous assurer que tous les termes sont clairs.

Pour contrer efficacement la pression, il faut être préparé. Voici quelques phrases simples mais puissantes à utiliser :

  • Face à une offre complexe : « Je préfère analyser le coût total du crédit et non seulement les mensualités. Pouvez-vous me donner le contrat détaillé pour que je l’étudie chez moi ? »
  • Face à une offre à durée limitée : « Je comprends. Si c’est une bonne offre aujourd’hui, elle le sera probablement encore demain. J’ai besoin de temps pour réfléchir. »
  • Face à l’argument de l’autre acheteur : « Parfait, je vous laisse son numéro au cas où ! Plus sérieusement, je reviendrai vers vous demain si elle est toujours disponible. »

Il est aussi crucial de connaître ses droits. Au Québec, la Loi sur la protection du consommateur (LPC) offre des protections importantes. Comme le rappelle l’Office de la protection du consommateur, la loi change la dynamique de pouvoir.

Au Québec, la Loi sur la protection du consommateur permet d’annuler un contrat de vente à crédit dans certaines conditions, ce qui change la dynamique de pouvoir et réduit l’anxiété de la signature

– Office de la protection du consommateur, Guide sur les contrats de vente à tempérament

Rappelez-vous que c’est vous qui avez le pouvoir : vous êtes le client avec le budget. Une bonne affaire n’a pas de date d’expiration. Si un vendeur refuse de vous laisser partir avec une offre écrite, considérez cela comme un signal d’alarme majeur et soyez prêt à quitter ce concessionnaire pour en trouver un plus transparent.

Fin de mois ou fin d’année : quand les vendeurs sont-ils prêts à tout pour vendre ?

Le prix d’une voiture n’est pas fixe. Il est soumis aux lois de l’offre et de la demande, mais aussi et surtout, aux objectifs de vente des concessionnaires et de leurs employés. Comprendre le calendrier interne de l’industrie automobile peut vous donner un avantage considérable lors de la négociation. Magasiner au bon moment, c’est mettre la pression sur le vendeur, et non l’inverse.

Les deux périodes les plus propices pour obtenir un excellent prix sont la fin du mois et la fin de l’année civile ou du modèle. Pourquoi ? Les vendeurs et les directeurs des ventes ont des objectifs mensuels, trimestriels et annuels à atteindre. De l’atteinte de ces cibles dépendent leurs bonus, qui représentent une part substantielle de leur rémunération. Un vendeur qui est à une ou deux voitures de son objectif à la fin du mois sera beaucoup plus enclin à réduire sa marge pour conclure une vente que le même vendeur en début de mois.

La fin de l’année est particulièrement intéressante. Les concessionnaires cherchent à liquider les modèles de l’année qui se termine pour faire de la place aux nouveaux arrivages. C’est le moment de chercher des « démos » ou des modèles neufs de l’année précédente qui sont encore en stock. La pression pour « nettoyer » l’inventaire est à son comble, et les rabais peuvent être significatifs.

Les véhicules démonstrateurs deviennent particulièrement intéressants en fin de mois, car les vendeurs doivent atteindre des cibles sur des véhicules déjà ‘en service’. Ces véhicules peuvent offrir des rabais substantiels tout en conservant la garantie complète du manufacturier.

– Stratégie du chasseur de démos, Virage Magazine

À l’inverse, certaines périodes sont moins favorables. Le début du printemps, lorsque les remboursements d’impôts arrivent et que l’envie de changer de voiture se réveille, est une période de forte demande. Les vendeurs ont moins d’incitatifs à négocier. De même, un samedi après-midi ensoleillé verra les concessionnaires bondés, et l’attention qu’on vous portera sera moindre.

La clé est donc d’arriver en fin de mois (idéalement les 2-3 derniers jours) ou en fin d’année (décembre), avec votre préapprobation de prêt en poche et prêt à signer si l’offre est la bonne. Vous inversez la dynamique : le vendeur a maintenant plus besoin de vous que vous n’avez besoin de lui.

Code postal et crédit : comment ces 2 facteurs changent votre prix du simple au double ?

Deux des facteurs les plus influents sur le coût total de votre voiture n’ont rien à voir avec le véhicule lui-même : il s’agit de votre lieu de résidence et de votre historique financier. Votre code postal et votre cote de crédit peuvent faire varier vos dépenses annuelles de centaines, voire de milliers de dollars. Comprendre leur impact est essentiel pour anticiper le budget réel.

Premièrement, l’assurance automobile. Les assureurs sont des statisticiens. Votre prime est calculée en fonction du risque que vous représentez, et ce risque est fortement lié à votre lieu de résidence. Un code postal dans une grande ville comme Montréal, avec une densité de circulation élevée et un taux de vols de véhicules plus important, entraînera une prime beaucoup plus élevée qu’un code postal en région rurale. Selon le GAA, la prime moyenne d’assurance au Québec était de 1 006 $ en 2024, mais ce chiffre cache d’énormes disparités régionales. Habiter dans certains arrondissements de Montréal peut facilement faire doubler ce montant.

Deuxièmement, votre cote de crédit. Ce chiffre est le reflet de votre fiabilité financière aux yeux des prêteurs. Une excellente cote de crédit (généralement 750 et plus) vous donne accès aux meilleurs taux d’intérêt, car vous êtes considéré comme un emprunteur à faible risque. À l’inverse, une cote plus faible vous pénalise avec des taux d’intérêt beaucoup plus élevés. L’impact sur le coût total d’un prêt est spectaculaire, comme le montre le tableau ci-dessous.

Impact du score de crédit sur le coût total d’un prêt de 25 000 $ sur 5 ans
Score de crédit Taux d’intérêt moyen Coût total sur 5 ans (prêt 25 000 $)
800 et plus 5-8% 28 250 $
700-799 5-8% 28 250 $
600-699 8-12% 30 500 $
Moins de 600 12-29.99% 34 000 $ +

Bien que vous ne puissiez pas changer votre code postal du jour au lendemain, vous avez un certain contrôle. De même, améliorer sa cote de crédit prend du temps, mais c’est un investissement payant. Voici des actions concrètes pour atténuer ces facteurs.

Votre plan d’action pour optimiser votre prime d’assurance

  1. Stationnement sécurisé : Prouvez à votre assureur que vous disposez d’un stationnement intérieur ou privé plutôt qu’un stationnement dans la rue.
  2. Système antivol : Faites installer un système de repérage approuvé par les assureurs (comme TAG) pour obtenir une réduction pouvant aller de 5 à 15%.
  3. Formation préventive : Suivez un cours de conduite préventive reconnu; certains assureurs offrent un rabais pour cela.
  4. Franchise et regroupement : Augmentez le montant de votre franchise (le montant que vous payez de votre poche en cas de réclamation) et regroupez vos assurances auto et habitation chez le même fournisseur pour bénéficier de rabais multi-contrats.
  5. Magasinez vos assurances : N’acceptez jamais la première offre. Comparez les soumissions d’au moins trois assureurs ou passez par un courtier.

En somme, votre budget auto ne dépend pas que de la voiture. Il est intimement lié à votre situation personnelle. Travailler à améliorer sa cote de crédit et à optimiser son contrat d’assurance sont des démarches aussi importantes que de négocier le prix d’achat.

Comment un VUS compact peut vous coûter 1 200 $ de plus par an qu’une compacte ?

Nous avons établi que le choix d’un VUS pour un usage urbain est un « gaspillage ». Mais comment ce gaspillage se matérialise-t-il concrètement dans votre budget annuel ? Allons au-delà des généralités et disséquons les coûts, ligne par ligne, en comparant deux véhicules de la même marque, réputés fiables et populaires au Québec : une berline compacte et un VUS compact. L’exercice est révélateur et montre comment de « petits » écarts s’accumulent pour former un surcoût annuel significatif.

Prenons l’exemple d’une Mazda3 (berline) et d’un Mazda CX-5 (VUS). Ces deux modèles partagent une philosophie de conception similaire, mais leur format différent a des conséquences financières directes. Le surcoût ne provient pas d’un seul poste de dépense, mais d’une accumulation de facteurs. Le VUS est plus lourd, plus haut, et a souvent une motorisation plus puissante et des pneus plus grands. Chaque détail a une incidence sur votre portefeuille.

La dépréciation est un autre coût invisible majeur. Si tous les véhicules subissent une dépréciation d’environ 50% après 3 ans, cette perte en dollars est bien plus importante sur un véhicule plus cher à l’achat. Perdre 50% d’un VUS à 35 000 $ représente une perte sèche de 17 500 $, contre 12 500 $ pour une berline à 25 000 $. C’est 5 000 $ de plus qui s’évaporent de votre patrimoine.

Le tableau suivant décompose le surcoût annuel moyen, en se basant sur une utilisation de 20 000 km par an. Les chiffres sont des estimations pour le marché québécois et peuvent varier, mais ils illustrent clairement la tendance.

Poste de dépense Mazda CX-5 (VUS) Mazda3 (Berline) Surcoût annuel
Assurance 1 200 $ 900 $ +300 $
Essence (20 000 km) 2 400 $ 1 800 $ +600 $
Pneus d’hiver (amorti/an) 450 $ 300 $ +150 $
Entretien préventif 600 $ 450 $ +150 $
Total surcoût annuel +1 200 $

Ce surcoût annuel de 1 200 $, combiné à la dépréciation supérieure, représente une somme considérable sur la durée de vie du véhicule. Sur 5 ans, c’est 6 000 $ de plus en frais de fonctionnement, sans compter le coût d’achat initial plus élevé. C’est le prix à payer pour un sentiment de sécurité et une position de conduite surélevée qui, objectivement, ne sont que rarement indispensables en conduite quotidienne.

À retenir

  • Le Coût Total de Possession (CTP) est la seule mesure fiable : il inclut le prix d’achat, le financement, l’assurance, l’entretien, l’essence et la dépréciation.
  • Le financement à très long terme (plus de 72 mois) est le piège principal du surendettement, créant un « capital négatif » (la « balloune ») difficile à résorber.
  • Votre patience est votre meilleure arme : ne jamais signer le jour même et magasiner en fin de mois ou d’année vous donne un avantage majeur dans la négociation.

Comment tester une voiture d’occasion en 20 minutes pour révéler ses défauts ?

Acheter une voiture d’occasion est une excellente façon d’optimiser son budget, mais cela comporte des risques. Un véhicule qui semble impeccable en surface peut cacher des problèmes coûteux. Un essai routier et une inspection rigoureuse sont donc non négociables. Si une inspection mécanique professionnelle est indispensable, vous pouvez déjà effectuer une première vérification efficace en 20 minutes pour déceler les signaux d’alarme et éliminer les mauvais candidats.

L’ennemi numéro un des voitures au Québec est la rouille, causée par le sel de voirie. Une inspection minutieuse est cruciale. Ne vous contentez pas d’un coup d’œil. Utilisez le flash de votre téléphone pour éclairer les zones sombres.

  • Bas de caisse et portières : Palpez le bas des portes et les passages de roue à la recherche de bulles sous la peinture, signe de corrosion perforante.
  • Châssis : Penchez-vous et inspectez les longerons (les poutres principales du châssis) et les points de levage, souvent les premiers touchés.
  • Intérieur des ailes et coffre : Ouvrez le coffre, soulevez le tapis et inspectez la zone autour des passages de roue. Faites de même à l’avant en regardant derrière les roues.

Ensuite, l’essai routier. Conduisez la voiture dans diverses conditions : accélération franche sur une bretelle d’autoroute, freinage appuyé (dans un endroit sécuritaire), virages serrés dans un stationnement vide. Soyez à l’écoute de bruits suspects (claquements, sifflements), de vibrations dans le volant ou d’un comportement anormal au freinage. Testez tous les équipements : climatisation, chauffage, vitres électriques, système audio.

Enfin, avant même de vous déplacer, les vérifications numériques sont cruciales au Québec pour éviter les fraudes et les vices cachés.

Les 3 vérifications numériques avant tout achat d’occasion au Québec

Avant de finaliser une transaction pour un véhicule d’occasion, trois étapes en ligne sont impératives. Premièrement, vérifiez le numéro d’identification du véhicule (NIV) sur le site du Registre des droits personnels et réels mobiliers (RDPRM) pour vous assurer qu’il n’y a aucune dette ou lien financier sur le véhicule. Deuxièmement, obtenez le rapport Carfax. Il fournit un historique complet des accidents, des dossiers d’entretien et du kilométrage. Troisièmement, et c’est la seule étape non-négociable, prenez rendez-vous pour une inspection mécanique complète dans un garage certifié, comme ceux recommandés par CAA-Québec. Le coût, autour de 150-200$, est un investissement minime pour éviter des milliers de dollars en réparations futures.

Cette démarche rigoureuse est votre meilleure assurance contre les mauvaises surprises. Comme le martèle l’organisme de référence pour les automobilistes québécois :

L’inspection mécanique dans un garage recommandé par CAA-Québec n’est pas une option mais une étape obligatoire avant tout achat d’occasion

– CAA-Québec, Guide d’achat de véhicule d’occasion

Cette inspection systématique en 20 minutes vous permet de filtrer rapidement les véhicules à problèmes. Pour les voitures qui passent ce premier test, l'inspection professionnelle reste l'étape finale et indispensable.

Pour appliquer ces conseils, la prochaine étape est de poser vos chiffres sur papier. Prenez le temps de faire vos propres calculs et de définir un budget total de possession réaliste avant même de mettre un pied chez un concessionnaire. C’est le geste le plus important que vous poserez pour protéger votre santé financière.

Questions fréquentes sur le budget automobile au Québec

Rédigé par Patrick Gagnon, Consultant en achat automobile et ex-directeur des ventes en concession. Spécialiste de la négociation, du financement et de l'évaluation de véhicules d'occasion.